La concurrence déloyale en publicité

Le Québec tout comme le Canada encourage la libre entreprise. Par conséquent, ils gravitent autour d’une économie de marché et la concurrence est encouragée, laissant place parfois à des actes de concurrence déloyale. Les auteurs[1] s’entendent pour dire que les actes de concurrence déloyale doivent être régis par le régime de responsabilité civile édictée par l’article 1457 du Code civil du Québec qui se lit comme suit :
"Toute personne a le devoir de respecter les règles de conduite qui, suivant les circonstances, les usages ou la loi, s'imposent à elle, de manière à ne pas causer de préjudice à autrui.
Elle est, lorsqu'elle est douée de raison et qu'elle manque à ce devoir, responsable du préjudice qu'elle cause par cette faute à autrui et tenue de réparer ce préjudice, qu'il soit corporel, moral ou matériel. Elle est aussi tenue, en certains cas, de réparer le préjudice causé à autrui par le fait ou la faute d'une autre personne ou par le fait des biens qu'elle a sous sa garde.»


L’inclusion des actes de concurrence déloyale dans le régime de responsabilité civile a permis d’en faire une classification des actes de concurrence déloyale démontrée dans l’arrêt Sport Maska Inc. c. Canstar Sports Group Inc.[2]

La classification des actes de concurrence déloyale
La classification des actes de concurrence déloyale s’établit comme étant i) Les actes de confusion, ii) Les actes de dénigrement, iii) Les actes de désorganisation et iv) Les actes parasitaires.
Les actes de confusion sont l’usage d’une manière prêtant à confusion d’une marque de commerce, d’un nom commercial, d’un habillage de produits (get-up), d’un signe, d’une publicité, etc. Lorsqu’un commerçant peut prouver que ses services, ses produits ou son entreprise sont reconnus auprès des consommateurs par des caractéristiques distinctives, aucun autre commerçant ne peut utiliser ces caractéristiques de manière à causer une confusion.
Les actes de dénigrement sont des déclarations fausses ou trompeuses qui discréditent l’entreprise, les produits ou les services des concurrents.
Les actes de désorganisation se divisent en deux : soit des actes posés à l’encontre d’un concurrent (débauchage d’employés, divulgation de secrets de commerce, espionnage commercial etc.) ou à l’encontre du marché pris globalement (publicité mensongère ou trompeuse, revente au-dessous du prix d’achat, pratique monopolistique, etc.)
Et finalement, les actes parasitaires. Cette catégorie est propre au droit européen et plus particulièrement au droit français, à laquelle on réfère généralement par l’expression « actes parasitaires » ou « parasitisme économique » qui consiste pour un tiers à vivre en parasite dans le sillage d’un autre en profitant des efforts qu’il a réalisés et de la réputation de son nom et de ses produits. Par ces actes, on vise plutôt à sanctionner les comportements qui consistent par exemple, pour une entreprise à utiliser une marque notoire appartenant à une autre entreprise qui se situe dans un secteur d’activités généralement radicalement différent
[3].

Le fardeau de la preuve en droit de la concurrence déloyale

Parce qu’il s’inscrit dans le cadre du régime de la responsabilité civile, le recours visant à protéger un habillage distinctif devra en principe pour être recevable au Québec, démontrer à la satisfaction du tribunal l’existence : a) d’une faute ; b) d’un dommage ; et c) d’un lien de causalité entre la faute et le dommage. La jurisprudence
[4] démontre que les tribunaux ont adopté une approche plutôt empirique, soit fortement basée sur les faits en cause. Ils ont donc sanctionné tantôt un comportement volontairement fautif avec ou sans preuve de confusion, tantôt un résultat dommageable (confusion) d’où ils ont interféré l’existence d’une faute préalable. Plus concrètement, le demandeur a le fardeau de démontrer que l’habillage d’un produit ou d’un service est devenu distinctif auprès du public, ce qui requiert que le propriétaire de l’habillage établisse par prépondérance de preuve que les consommateurs perçoivent les caractéristiques du produit ou service comme une indication de son origine.

Lorsque la preuve de caractère distinctif est requise, la meilleure démonstration en ce sens provient généralement des consommateurs eux-mêmes, par voie de témoignages directs ou par le biais de sondages ou par une preuve indirecte du caractère distinctif d’un habillage, par preuve de publicités, de chiffres de ventes et le plus souvent par la combinaison des deux, comme le souligne la jurisprudence. De plus, les éléments formant l’habillage ne doivent pas en principe être communs à l’industrie.

Il faut également démontrer qu’un commerçant utilise le nom, la marque de commerce ou encore l’emballage d’un produit de manière à créer chez les clients l’impression que son commerce est celui d’un autre déjà bien établi, ou encore qu’il est une filiale ou qu’il lui est relié d’une façon quelconque.

Bien que le Québec encourage la libre entreprise et la concurrence, elle ne doit pas se faire au détriment de la concurrence. Les propos du juge Estey soulignés dans l’arrêt Consumers Distributing Co. c. Seiko Times Canada Ltd.
[5], résume bien l’ensemble de cette chronique « si la concurrence est l’âme du commerce, les efforts faits par un concurrent pour enlever à l’adversaire la position qu’il occupe et attirer sa clientèle doivent respecter les règles d’honnêteté et de bonne foi qui sont à la base des transactions commerciales. Lorsqu’un concurrent cherche à s’approprier, par la tromperie, l’avantage de la réputation bien établie du commerce ou du produit de son adversaire, il se livre à une concurrence déloyale ».

[1] P. Bourbonnais, L’Action en concurence déloyale en droit canadien et en droit québécois, Thèse de Maîtrise, Université de Montréal, 1979; M. Goudreau, « Concurrence déloyale en droit privé – commentaires d’arrêts », (1984) 15 R.G.D. 133; F. Shanfield Freedman « Passing Off in Québec », (1985) 45 R. du B. 641
[2] (1995) 57 C.P.R. (3d) 323
[3] Encyclopédie juridique Dalloz, 2e éd., Recueil 5e, Concurrence Déloyale, page 5.
[4] Acme Vacuum c. Acme Vacuum Co., [1953] B.R. 188; Hébert et Fils c. Désautels, [1971] C.A. 185
[5] [1984] 1 R.C.S. 583

Note de l'auteur: L'information contenue dans cette chronique est générale et ne constitue pas un avis juridique
Tiré de La pub et le droit, http://publiciteetdroit.blogspot.com/
 

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